La première chose que l’on me demande lorsque je dis que mon petit frère est autiste c’est : est-ce qu’il a un super pouvoir ? Est-ce qu’il peut compter le nombre de cure-dents qui tombent par terre? Est-ce qu’il peut apprendre le bottin téléphonique par cœur? Et à chaque fois je me lance dans une longue et confuse explication de ce qu’est l’autisme et toutes les branches qui s’y relient pour finalement juste répondre, non il n’a pas de pouvoir, il a juste l’air gêné. D’abord en quoi il est différent ? La vérité : en peu de choses. Parce que c’est mon petit frère et comme tous les petits frères de ce monde, il aime taquiner ses sœurs, détruire leurs maisons de Barbies, fouiller dans leur chambre, voler la télécommande quand elles écoutent leur émission et j’en passe! Mais c’est çala définition d’un petit frère! Et le mien n’y fait pas exception! La différence en fait, c’est qu’en tant que grande sœur d’un frère autiste, j’ai la chance de le voir réaliser des défis au quotidien. Avoir un petit frère autiste, c’est se réjouir lorsqu’on l’entend faire une conversation complète ou encore lorsqu’on le voit se tenir bien droit dans un lieu public. On est une famille encore plus unie grâce à lui; moi, ma sœur, mes parents on est toujours présents à chaque fois qu’il reçoit une distinction et je peux vous dire qu’on est ceux qui applaudissent le plus fort! Mon privilège c’est de la voir surmonter des défis à chaque jour. De le voir passer par-dessus son handicap, évoluer et s’améliorer socialement et intellectuellement… Il a changé notre perception de la normalité, de la vie. Grâce à lui, nous sommes conscientes de la réalité et des difficultés des personnes différentes. C’est sûr qu’avoir un petit frère autiste c’est faire des sacrifices. Y’a des jours où ça va moins bien… ou qu’on est tanné de répéter les mêmes choses et que lui nous répète les mêmes choses! Mais selon moi, c’est rien en comparaison de toute la fierté qu’il m’apporte. Alors, quand je le vois accomplir toutes ces grandes choses par lui-même, toucher tellement de personnes par ses actions, démontrer autant de courage, je me dis que c’est peut-être ça son super pouvoir. Anne-Marie

Au risque de me répéter….l’autisme est un état, une manière d’être! Je n’essaie pas de combattre l’autisme de mes fils… Je ne veux pas vaincre l’autisme… Ce n’est pas une maladie!!! Tout ce que je veux c’est bâtir un pont assez solide pour communiquer et vivre avec mes fils… Les personnes autistes ont plein de choses à nous apprendre… Elles sont d’une logique déroutante… Elles ne mentent jamais… Elles voient les choses telles qu’elles sont… Elles ne s’encombrent pas de règles sociales étouffantes… Mes fils n’ont absolument rien à faire d’avoir des vêtements de marque sur le dos… Mes fils n’ont absolument rien à faire de la classe sociale des gens…. Mes fils m’ont fait voir la beauté de la pluie et la magie de jouer dans les flaques d’eau! Mes fils me ramènent sans cesse à l’essentiel de la vie! Je pense que les personnes autistes rendent l’humanité plus belle… Quand vous irez dans un lieu public, si vous voulez voir une personne autiste… Fermer les yeux et ouvrez votre cœur… Une personne autiste peut être assise à côté de vous et vous ne la voyez même pas… Elle peut passer totalement inaperçue! Mais vous verrez peut-être aussi un enfant agité ou en crise… Un grand garçon comme mon Pierre qui a des tics et qui s’exprime mal… Un tout petit garçon comme mon Xavier qui chante à tue-tête.. Un parent qui essaie de garder le contrôle sur son enfant… Vous ne connaissez pas leur histoire…soyez gentil… ne jugez pas…garder le cœur ouvert! L’autisme a mille visages… Je compte sur vous pour faire la différence…. MARYSE, MAMAN DE PIERRE, 16 ANS (AUTISTE, SYNDROME DE GILLES DE LA TOURETTE, TROUBLE DU DÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC HYPERACTIVITÉ) ET DE XAVIER , BIENTÔT 3 ANS, (AUTISTE ET CHANTEUR PROFESSIONNEL)

Une chose qui n’est vraiment pas facile à gérer c’est l’anxiété… L’anxiété accompagne souvent l’autisme et le syndrome de Gilles de la Tourette! Et qu’est-ce qui rend anxieux? Tout peut rendre anxieux… Mais j’aimerais que vous compreniez bien une chose… l’anxiété, ce n’est pas un caprice!

On ne dit pas à une personne anxieuse de ne pas l’être et que ça va passer juste en lui parlant! C’est comme si vous aviez une plaie ouverte sur un bras et que je vous demandais d’arrêter de saigner!! Des choses très anodines pour vous et moi peuvent êtres terriblement anxiogènes pour mes garçons!

Par exemple :
-Pierre a eu une remplaçante à l’école…
-maman ou papa qui doivent partir..
-une panne d’électricité…
-des nouvelles chaussures…
-la sonnerie du téléphone… (Ça j’ai encore de la misère à comprendre, quand le téléphone sonne, Pierre a plein de tics!)
-quand je porte un vêtement qu’ils n’ont jamais vu, ils ont peur que je
parte..
-aller dans un nouvel endroit… (Surtout Xavier quand nous allons dans
une nouvelle maison!)
-une armoire ouverte…
-la télécommande qui n’est pas à sa place…
-un vol d’outardes…(crise de panique incontrôlable!)

Avec Pierre, c’est facile pour moi de reconnaître les signes d’anxiété parce que je le connais bien et que ces signes sont (presque toujours) visibles! Par exemple, il aura vraiment beaucoup de tics avec ses mains et des tics vocaux, il va mal dormir! Pour Xavier….c’est autre chose…il tombe malade…il est tellement anxieux qu’il se met à faire de la fièvre…il ne contrôlera pas sa salive…il va avoir des terreurs nocturnes…il peut même se mettre à vomir! Et là….qu’est-ce qu’ont fait?? Bien on essaie de prévoir l’imprévisible…on fait des horaires pour presque tout! Et une fois enclenché, on essaie de désamorcer tout ça! Revenir dans leur environnement, leur routine le plus vite possible! Avec des sacs chauffants que je leur ai fabriqué, de la musique très basse, les lumières éteintes, des étreintes très fortes, des massages des mains…couper les ongles… Et parfois nos animaux de compagnies nous donnent un coup de main… Que ce soit pour les brosser ou les nourrir! Partir faire un tour en voiture est aussi une formule gagnante!! (Ça les apaise énormément!) La chambre sensoriel que nous avons créé pour Pierre est une merveille dans ces cas-là! On doit improviser souvent des méthodes calmantes, apaisantes. Trouver de nouvelles solutions sans arrêt! Mais que nous en avons mis du temps à tout comprendre…ça a pris des années! J’ai surtout compris pourquoi on ne dit pas « faire de l’anxiété » mais bien « souffrir d’anxiété »!